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Agriculture connectée : l’Afrique peut-elle capter une part d’un marché de 60 milliards $ ?


Agriculture connectée : l’Afrique peut-elle capter une part d’un marché de 60 milliards $ ?

Le marché mondial de l’Internet des objets (IdO) appliqué à l’agriculture devrait atteindre 60,12 milliards de dollars d’ici 2032, contre 23,41 milliards en 2024, selon un rapport publié en avril 2025 par la société de conseil SNS Insider. Alors que la même source indique que les grandes exploitations agricoles dominent le marché grâce à leur capacité à investir dans ces technologies, l’Afrique peut-elle capter une part de ce potentiel ? Au-delà des prévisions de croissance de ce marché, comment le continent peut-il tirer profit de ces technologies pour résoudre les problèmes de son secteur agricole vital pour ses économies ?

Les technologies connectées gagnent du terrain dans les exploitations agricoles du monde entier. Drones, capteurs intelligents, systèmes d’irrigation automatisés ou encore plateformes de gestion en ligne s’imposent progressivement comme des outils clés de la modernisation agricole. Cette dynamique est portée par la montée en puissance de l’agriculture de précision, la recherche d’une meilleure efficacité dans l’utilisation des ressources, l’intégration de l’intelligence artificielle et l’automatisation des tâches. Les pouvoirs publics jouent également un rôle croissant en soutenant la digitalisation du secteur et en promouvant des pratiques agricoles plus résilientes face aux effets du changement climatique, comme le souligne le cabinet SNS Insider.

De même, une autre étude menée par le groupe indien Jain Irrigation Systems, spécialiste de l’irrigation de précision, révèle que les systèmes d’irrigation reposant sur l’Internet des objets (IdO) permettent de réduire la consommation d’eau de 30 à 50 %, tout en améliorant les rendements agricoles. Dans le même esprit, une expérimentation conduite en 2021 au Pakistan, sur un verger de citronniers de 0,8 hectare, a démontré l’intérêt d’un système d’aide à la décision (SAD) combinant données météorologiques et informations en temps réel transmises par des capteurs connectés. Par rapport à une exploitation gérée de manière traditionnelle, les résultats ont fait état d’une économie d’eau d’environ 50 % et d’une hausse de rendement de 35 %, malgré des conditions climatiques parfois extrêmes, avec des températures dépassant les 50 °C.

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Des initiatives émergentes en Afrique

L’Afrique ne reste pas en marge de cette transformation. Sur le continent, l’Internet des objets (IdO) transforme progressivement l’agriculture grâce à des initiatives innovantes portées par des start-up et des programmes publics, mus par la volonté d’apporter des solutions aux petits exploitants agricoles, qui fournissent 80 % de la production alimentaire.

Au Nigeria, la start-up Hello Tractor propose depuis 2011 une solution innovante d’accès partagé aux équipements agricoles. Surnommée l’« Uber des tracteurs », la plateforme met en relation les propriétaires de tracteurs et les petits exploitants, optimisant l’utilisation des machines grâce à une technologie de géolocalisation. L’entreprise revendique aujourd’hui une communauté de plus de 1,4 million d’agriculteurs ayant recours à son service, preuve d’un fort besoin d’outils mécanisés accessibles à grande échelle.
 


Au Ghana, AgroCenta s’est positionnée depuis 2015 comme un acteur majeur de la digitalisation de la chaîne de valeur agricole. Sa plateforme numérique permet aux agriculteurs de vendre directement leurs produits à des acheteurs, d’accéder à des services financiers et logistiques, et de réduire les coûts liés aux intermédiaires. Cette approche contribue à améliorer les revenus des producteurs tout en fluidifiant les circuits de commercialisation.

Du côté des gouvernements, des stratégies structurantes voient également le jour. Le Rwanda a lancé en 2017 le Smart Nkunganire System, un programme de gestion numérique des subventions aux intrants agricoles. Développé en partenariat avec BK Techouse et le Rwanda Agriculture and Animal Resources development Board (RAB), ce système repose sur une base de données centralisée permettant de suivre l’offre et la demande en temps réel, de renforcer la transparence et d’améliorer l'efficacité de la distribution.

Plus récemment, l’Éthiopie a officialisé en février 2025, sa Digital Agriculture Roadmap (DAR), un plan national ambitieux pour digitaliser son agriculture d’ici 2033. Cette feuille de route vise à intégrer l’IdO et d'autres technologies dans les pratiques agricoles, illustrant la volonté politique du pays de moderniser le secteur et de soutenir les exploitants dans leur transition numérique.

Un potentiel encore contraint

Bien que ces quelques initiatives témoignent d’une prise de conscience grandissante des bénéfices de l’IdO pour l’agriculture en Afrique, la percée est encore timide en raison de nombreux facteurs.

Une étude publiée en 2023, intitulée « Digital Technology Adoption in the Agriculture Sector: Challenges and Complexities in Africa », met en lumière plusieurs obstacles majeurs à l’adoption de ces solutions, notamment le manque d'infrastructures et de connectivité, l’accès restreint aux technologies et aux compétences numériques, le déficit de financement, les préoccupations liées à la confidentialité et à la sécurité des données, un cadre réglementaire insuffisant et la résistance des agriculteurs au changement.

« L’absence d’infrastructures de base dans de nombreuses zones rurales, notamment l’électricité et la connectivité Internet, limite fortement la capacité des agriculteurs à accéder aux technologies numériques et à les utiliser, qu’il s’agisse d’outils d’agriculture de précision ou d’applications mobiles. Sans accès régulier à l’électricité et à Internet, ces technologies risquent de ne pas fonctionner à leur plein potentiel, ce qui réduit leur efficacité et leur utilité sur le terrain », peut-on lire dans le document. Les données compilées par la GSMA indiquent par exemple que l’Afrique subsaharienne demeure la région du monde où le taux de pénétration d’Internet est le plus faible, même si des progrès ont été réalisés ces dernières années. 

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Ces contraintes freinent particulièrement l’adoption des technologies connectées dans les zones rurales où la fracture numérique est plus prononcée, alors que les fermes agricoles sont nombreuses dans lesdites zones.  

Malgré ces défis, le secteur agricole en Afrique a le potentiel de se transformer en une industrie prospère, respectueuse de l'environnement et technologiquement avancée, si les investissements appropriés sont réalisés. Le boom mondial de l’IoT agricole, s’il se concrétise davantage, peut être une opportunité stratégique pour moderniser l’agriculture africaine, mais cela nécessitera une coordination forte entre États, investisseurs et start-up. Pour capter une part significative de ce marché en pleine expansion, le continent devra surmonter les défis structurels, renforcer les infrastructures numériques et faciliter l’accès au financement pour les agriculteurs. Si ces conditions sont réunies, l’IdO pourrait non seulement révolutionner l’agriculture africaine, mais aussi contribuer à la sécurité alimentaire du continent.





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« Une position incohérente et hypocrite », Capitaine Touré recadre Me Youm après sa déclaration sur l’amnistie

L’ancien capitaine de la gendarmerie et actuel Directeur général de l'Agence d’Assistance à la Sécurité de Proximité (ASP), Seydina Oumar Touré, a vivement critiqué la récente prise de position de Me Oumar Youm, ancien ministre sous le régime de Macky Sall.

S’exprimant sur la polémique autour de la loi interprétative qui sera soumise au vote le 2 avril à l’Assemblée nationale, Seydina Oumar Touré s’étonne de l’attitude de l’ancien ministre, qu’il juge contradictoire avec son propre engagement politique. « J’ai parcouru le texte de Maître Oumar Youm, ancien ministre du Président Macky Sall. Je trouve sa position très paradoxale, c’est à la limite une négation de son appartenance politique », a-t-il déclaré.

Me Youm, de son côté, dénonce cette loi interprétative qu’il considère comme une reconnaissance implicite des crimes et délits imputés aux membres du PASTEF. Il estime qu’au lieu d’abroger la loi d’amnistie promise, le pouvoir en place propose un texte « indigeste » visant, selon lui, à protéger des « délinquants » au détriment de ceux qui ont défendu la République.

En réponse, Seydina Oumar Touré remet en question la cohérence de la démarche de Me Youm, rappelant que cette loi a été adoptée sous son propre gouvernement. « Faire voter une loi par son parti en marge des canaux appropriés, en moins d’une année, et ‘espérer’ son abrogation, tout en reprochant au régime en place de ne pas l’avoir abrogée, me paraît incroyablement incohérent et foncièrement hypocrite », a-t-il asséné.

Allant plus loin dans son analyse, l’ancien officier de la gendarmerie accuse l’ancienne majorité, aujourd’hui dans l’opposition, de manquer de respect au peuple sénégalais. « Aujourd’hui plus que jamais, le pouvoir de jadis, opposition actuelle, repousse inexorablement les limites de l’irrespect et du manque de considération vis-à-vis du peuple souverain », a-t-il conclu.