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Un magistrat corrige sèchement Ismala Madior Fall

Jeudi 8 Février 2024

Un magistrat corrige sèchement Ismala Madior Fall
Réponse au Pr Ismaïla Madior FALL : RESPECTER LA SEPARATION DES
POUVOIRS !
 
En dépit de son droit de réserve, le magistrat peut, comme l’y autorise l’article 11 de son
Statut, traiter dans les médias des sujets d’ordre professionnel ou technique.
Dans une interview accordée à un organe de presse, le Pr Ismaila Madior FALL, ministre des
Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, avec le drapeau national mis en exergue,
s’est prononcé sur beaucoup de points suite au report annoncé de l’élection présidentielle du
25 février 2024 et le vote par l’Assemblée nationale d’une loi entérinant ce report au 15
décembre 2024.
Sur l’éventualité d’un recours devant le Conseil constitutionnel, il est revenu en détails pour
faire des développements sur la nature de la loi votée à l’Assemblée nationale. Il la qualifie de
loi constitutionnelle et estime qu’elle est particulière et couverte d’une certaine
« injusticiabilité ». Ajoute-t-il, conformément à sa jurisprudence constante, le Conseil
constitutionnel « se déclare incompétent pour contrôler la loi constitutionnelle... le pouvoir
constituant est souverain … si elle était attaquée le Conseil constitutionnel se déclare
incompétent ».
Etant membre du Gouvernement actuel, du pouvoir exécutif, il devrait s’abstenir de prendre
une telle position dès lors que le Conseil constitutionnel pourrait être saisi de recours contre
cette loi. Cette démarche publique, empreinte de certitude dans son propos affirmatif, viole la
séparation des pouvoirs proclamée et garantie par la Constitution du Sénégal avec son
corollaire, l’indépendance de la justice. Les révolutionnaires de 1789 l’ont déjà gravée dans
l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, en ces termes : « toute
société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs
déterminée, n’a point de Constitution ».
Ce principe général de droit qui prévoit des attributions propres pour les pouvoirs législatif,
exécutif et judiciaire comporte des implications plus avancées, à savoir, le respect par un
membre d’un pouvoir donné des attributions de l’autre pouvoir. Toute déclaration
tendancieuse de nature à porter atteinte, à influencer ou à gêner l’office du juge est à
proscrire. Ces pouvoirs coexistent dans un Etat démocratique; les hommes ou femmes qui les
incarnent doivent par conséquent faire preuve de retenue sous peine d’installer la confusion
des rôles, décrite par Montesquieu dans L’Esprit des lois comme l’un des « plus grands
dangers ».
Du respect de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs dépendent la perception positive ou
négative du citoyen de sa justice et sa confiance dans les Institutions de la République.
 
Youssoupha DIALLO
 Magistrat

Sambou Biagui




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